Une fois la dot offerte à la famille de la mariée, elle était considérée comme un symbole d’honneur. C’était une tradition. Aujourd’hui tout a changé. Maintenant, il échange de l’argent. A Goma, certaines familles vont même jusqu’à refuser le mariage à leur fille si le prix de la dot n’est pas jugé raisonnable. Il y a trente ans, de jeunes garçons mariés de la province du Nord-Kivu, à l’est de la RDC, dotaient leur douceur d’une dot en nature qui se composait généralement de vaches, de houes, de vin, d’huile, de pain… Dans ces symboles, tout ce qui constitue la dot représentée dans la pratique habituelle : une valeur ou un bien. Chaque clan avait sa particularité dans cette représentation symbolique avant de négocier la dot en espèces. Aujourd’hui, la dot monnayée est combattue par certains afin de lui redonner sa valeur coutumière et symbolique dans notre société moderne. Muhima Sikilivu, la soixantaine, était l’un des douaniers du clan Hunde au Nord-Kivu. Elle milite pour le respect et la restauration de la valeur traditionnelle de la dot.
Selon la coutume : que représente la dot?
Muhima Sikilivu : La dot n’est pas de l’argent ou de la richesse pour la famille. Mais c’est un symbole sacré qui représente : l’honneur, le respect, la reconnaissance ou la gratitude d’une famille à l’autre. Lorsqu’une famille donne sa fille à un enfant d’une autre famille, en retour ce signe de dot coutumier doit être fait en conséquence. Une dot n’est pas de l’argent. Si c’était le cas, la famille vendrait sa fille. C’est pourquoi il est toujours donné en nature (représenté par des objets) pour symboliser quelque chose. Tout dépend du clan.
A Goma, la dot est obligatoirement payée en argent, est-ce normal?
Muhima Sikilivu : Pas du tout. La mondialisation affecte gravement nos cultures. Les gens qui vivent en ville oublient souvent les pratiques habituelles. Le monde entier est devenu capitaliste. Si on veut la fille d’un autre, il faut en payer le prix : c’est absurde avec nos enfants. Qu’une dot soit réduite dans une petite enveloppe contenant plusieurs milliers de dollars. En revanche, c’est avec cet argent qu’il faut acheter des choses qui ont une certaine considération par rapport aux titres habituels. Ce qui constitue le symbole. Parfois, il est dégoûtant de voir à Goma que certaines familles refusent même le mariage à leur fille, car le prix de la dot offert par la famille du garçon n’a pas été satisfaisant. C’est une des raisons de lutter contre cette situation.
Que faut-il faire pour redonner à la dot ses valeurs?
Muhima Sikilivu : Je pense que les gens manquent de bonne volonté, la cupidité les détruit. Ils ont juste inversé l’ordre des choses. Au lieu de recevoir avec honneur les éléments constitutifs (vaches, vaches, vins…) de la dot, ils les apprécient en argent. C’est l’exploit réel qui sera donné. Pitié. C’est pourquoi on assiste encore au divorce de jeunes couples car la dot offerte est basée sur l’argent et non sur des valeurs traditionnelles. C’est une malédiction déjà en amont. J’appelle tous les anciens de leurs différentes familles à défendre la dot avec leurs valeurs traditionnelles. C’est leur devoir, car ils sont les garants du respect des coutumes dans la famille. Cela doit être fait pour le bien du couple. Et récupérer cette valeur africaine encore perdue!